A Orvault (44), l’ESAT des ateliers de la Cholière a lancé depuis 2020 le projet « de l’assiette aux baskets ». Le régime et le jogging pour tout le monde ? L’établissement a plutôt choisi d’aménager l’environnement de ses travailleurs pour favoriser leur santé. Aurélie Goncalvez, coordinatrice socio-professionnelle de l’ESAT, nous en dit plus.
Pouvez-vous nous présenter l’ESAT rapidement ?
Nous faisons partie des 12 ESAT de l’ADAPEI de Loire-Atlantique. Il regroupe notre site d’Orvault et un site annexe près de Sautron. Nous sommes 25 salariés, qui accueillons 140 travailleurs en situation de handicap. Il peut d’agir de handicap mental, psychique, d’autisme, ou de déficiences légères et moyennes. Ils travaillent, à temps plein ou temps partiel, sur différents ateliers : les espaces verts, le conditionnement et la sous-traitance, le nettoyage industriel.
Comment s’organise la vie des travailleurs de l’ESAT ?
Les travailleurs vivent en foyer d’hébergement, dans leur propre logement, ou en famille. Lorsqu’ils sont à l’ESAT, ils déjeunent dans un restaurant juste à côté, qui est à la fois une entreprise adaptée et un restaurant commercial. Ce sont les moniteurs de service qui les accompagnent. Ce n’est pas toujours évident pour eux, qui ne se sentent pas forcément légitimes pour poser un regard sur le contenu de l’assiette.
Qu’est-ce qui vous a amenés à lancer le projet « de l’assiette aux baskets » ?
Nous menions depuis longtemps une réflexion autour de la problématique de la prise de poids. Nous avions des retours des familles qui s’inquiétaient, des foyers, de la médecine du travail, des travailleurs eux-mêmes. L’alimentation est très présente dans leur quotidien. Nous savions qu’il fallait changer les choses au niveau du restaurant. Il n’y avait pas assez de concertation sur les repas, leur diététicienne était partie. Le restaurant livre aussi certains foyers d’hébergement, certains travailleurs se retrouvaient à manger deux fois le même repas.
Quelle a été votre première étape ?
Nous avions envie d’apporter une réponse adaptée aux familles. Nous sommes entrés en contact avec l’association Du Pain sur La Planche pour être accompagnés. Nous avons organisé un comité de pilotage en mars 2020, en invitant des personnes avec différents profils : les travailleurs, salariés et la direction de l’ESAT, les salariés et bénévoles des foyers, les représentants de parents… 22 personnes ont répondu présent et on a pu constater que c’était un vrai soulagement pour eux de pouvoir parler ensemble, en sachant que tout le monde est dans le même navire.
Comment s’organise le projet ?
A l’occasion du Copil, nous nous sommes interrogés sur la finalité de notre projet. Plutôt que d’essayer de faire perdre du poids à nos travailleurs, qui ne sont pas forcément en capacité de faire des choix éclairés pour leur santé, nous avons décidé de travailler sur un environnement global qui favorise leur santé. Nous avons mis en place quatre ateliers : l’alimentation au sein de l’ESAT, l’alimentation en-dehors de l’ESAT, l’activité physique à l’ESAT, l’activité physique en-dehors de l’ESAT. Le contexte sanitaire a tout stoppé après le premier Copil et nous n’avons pu démarrer les groupes de travail et les actions qu’en septembre 2021. Mais depuis, les choses ont bien avancé !
Quelles sont les actions mises en place autour de l’alimentation ?
Concernant les déjeuners au restaurant, un nouveau chef cuistot est arrivé, avec l’envie de mettre en place des choses. Une nouvelle diététicienne l’a rejoint et depuis mars 2022, des menus à choix dirigés sont proposés. Des dégustations autour de l’éveil sensoriel sont aussi organisées à l’entrée du restaurant, pour faire découvrir d’autres saveurs. En ce qui concerne les dîners dans les foyers, nous avons échangé autour des recommandations nutritionnelles avec les salariés chargés de passer les commandes auprès des prestataires. Nous devons faire un point ensemble sur les évolutions. En parallèle, nous menons une réflexion sur les petits-déjeuners, que peu de travailleurs prennent car le matin est source de beaucoup de stress pour eux. Nous avons diffusé un questionnaire pour savoir si une collation en arrivant le matin pourrait convenir.
Et autour de l’activité physique ?
Nous avons mis en place un réveil musculaire d’un quart d’heure tous les matins à l’ESAT et nous avons en moyenne 25-30 participants. Au temps de pause du midi, nous proposons une fois par semaine des activités simples : tournoi de tennis de table, football, danse…
Concernant l’activité physique en-dehors de l’ESAT, c’est plus compliqué car il faut travailler sur la motivation. Les foyers essayent beaucoup de choses, cherchent des clubs… mais les freins sont encore nombreux. Nous avons fait appel à l’associations Sports pour tous pour nous aider.
Quelles sont les conditions de réussite d’un tel projet ?
Il ne faut pas que cela repose sur une seule personne, c’est un projet d’équipe. Avant que les actions ne soient lancées, il y a un gros travail de préparation en amont. Et il faut pouvoir pérenniser, le projet doit s’inscrire dans la culture de l’ESAT.
Propos recueillis par Anne-Cécile Adam
